7
Un peu après vingt et une heures, le téléphone de Gustaf Wetterstedt sonna à nouveau. Wallander avait alors obtenu l’aide de collègues à Stockholm pour annoncer le décès à la mère de Wetterstedt. C’était l’inspecteur Hans Vikander, de la « police d’Östermalm ». Dans quelques jours, on remplacerait cette vieille appellation par le nom de « police de la cité ».
— Elle est au courant, dit-il. Comme elle est très vieille, je suis venu avec un pasteur. Mais je dois dire qu’elle a pris la nouvelle calmement, malgré ses quatre-vingt-quatorze ans.
— C’est peut-être justement pour ça, répondit Wallander.
— Nous recherchons les deux enfants de Wetterstedt, poursuivit Hans Vikander. L’aîné, son fils, travaille pour les Nations unies à New York. Sa fille habite à Uppsala. Nous espérons pouvoir les joindre dans la soirée.
— Et son ex-femme ? dit Wallander.
— Laquelle ? demanda Hans Vikander. Il s’est marié trois fois.
— Les trois. Nous prendrons nous-mêmes contact avec elles, plus tard.
— J’ai une information qui va peut-être t’intéresser. La mère de Wetterstedt nous a expliqué que son fils lui téléphonait ponctuellement tous les soirs, à vingt et une heures précises.
Wallander regarda sa montre. Il était vingt et une heures trois. Il comprit aussitôt l’importance de ce que Vikander venait de lui dire.
— Il n’a pas appelé hier, poursuivit Hans Vikander. Elle a attendu jusqu’à vingt et une heures trente. Puis elle essayé de le joindre. Personne n’a décroché, bien qu’elle ait laissé sonner le téléphone au moins quinze fois.
— Et la veille ?
— Elle n’a pas réussi à s’en souvenir de manière très précise. Elle a quand même quatre-vingt-quatorze ans. Elle reconnaît que sa mémoire immédiate n’est pas très bonne.
— Elle avait autre chose à dire ?
— C’était un peu difficile de savoir ce qu’il fallait lui demander.
— Nous aurons besoin de lui parler à nouveau, dit Wallander. Comme elle te connaît déjà, le mieux serait que tu t’en charges.
— Je pars en vacances la deuxième semaine de juillet, répondit Hans Vikander. Jusque-là, ça marche.
Wallander raccrocha. Ann-Britt Höglund apparut dans l’entrée, elle avait vérifié le contenu de la boîte aux lettres.
— Les journaux d’hier et d’aujourd’hui. Une facture de téléphone. Pas de lettre personnelle. Ça ne doit pas faire longtemps qu’il est sous ce bateau.
Wallander se leva du canapé.
— Fais encore une fois le tour de la maison, dit-il. Regarde si tu peux trouver des signes indiquant que quelque chose a été volé. Je descends le voir.
La pluie s’était mise à tomber très fort. Tandis qu’il se dépêchait de traverser le jardin, Wallander se souvint qu’il aurait dû aller voir son père. Il fit une grimace et retourna dans la maison.
— Rends-moi un service, demanda-t-il à Ann-Britt une fois dans l’entrée. Appelle mon père et dis-lui que je suis pris par une enquête urgente. S’il demande qui tu es, réponds que tu es le nouveau chef de la police.
Elle hocha la tête en souriant. Wallander lui donna le numéro de téléphone. Puis il retourna sous la pluie.
Éclairé par les puissants projecteurs, le lieu du crime avait pris un aspect fantomatique. Très mal à l’aise, Wallander entra sous l’auvent qu’on avait installé. Le corps de Gustaf Wetterstedt était sur le dos, sur une toile plastique. Le médecin qui avait été appelé était justement en train d’éclairer sa gorge avec une lampe de poche. Il s’interrompit quand Wallander arriva.
— Comment ça va ? dit le médecin.
Wallander le reconnut. C’était lui qui l’avait examiné aux urgences, la nuit où il avait cru qu’il avait une attaque.
— En dehors de ça, je me porte bien, répondit Wallander. Ça n’a jamais recommencé.
— Mes conseils ont été suivis ? demanda le médecin.
— Pas du tout, bredouilla Wallander, gêné.
Il contempla le cadavre : mort, il donnait la même impression qu’autrefois, à la télévision. Son visage, même couvert de sang coagulé, avait une expression autoritaire et méprisante. Wallander se pencha en avant pour regarder la blessure qui remontait vers le haut du crâne, là où la peau et les cheveux avaient été arrachés.
— De quoi est-il mort ? demanda Wallander.
— D’un coup puissant sur la colonne vertébrale, répondit le médecin. La colonne est tranchée juste au-dessous des omoplates. Il a dû mourir avant même de tomber par terre.
— Êtes-vous sûr que ça s’est passé dehors ? demanda Wallander.
— Il me semble. Le coup dans le dos a dû être donné par quelqu’un qui se trouvait derrière lui. Selon toute probabilité, la force du coup a dû le faire tomber en avant. Il a du sable dans la bouche et dans les yeux. Le plus vraisemblable est que ça se soit passé ici, à proximité.
Wallander montra la tête déformée de Wetterstedt.
— Et comment expliquez-vous ça ?
Le médecin haussa les épaules.
— L’entaille dans le front a été faite avec un couteau bien aiguisé. Ou une lame de rasoir. Quant à savoir si ça a été fait avant ou après qu’il a reçu le coup dans le dos, je ne peux pas me prononcer pour le moment. Ce sera le boulot du laboratoire de pathologie de Malmö.
— Malmström va avoir beaucoup de travail.
— Qui ?
— Hier, nous lui avons envoyé les restes d’une fille qui s’est suicidée par le feu. Et maintenant nous voilà avec un homme qui a été scalpé. Le médecin auquel j’ai parlé s’appelle Malmström. Une femme.
— Il y a plus d’un médecin là-bas. Je ne la connais pas.
Wallander s’accroupit devant le cadavre.
— Donnez-moi votre point de vue. Qu’est-ce qui s’est passé ?
— Celui qui lui a donné un coup dans le dos savait ce qu’il faisait. Un bourreau n’aurait pas fait mieux. Mais qu’on l’ait scalpé ! Ça pencherait plutôt en faveur d’un fou.
— Ou d’un Indien, dit Wallander pensivement.
Il se leva et sentit une douleur dans ses genoux. Le temps où il pouvait s’accroupir impunément était loin.
— Pour ce qui est de mon travail ici, j’ai fini. J’ai déjà signalé à Malmö que nous allions amener le corps.
Wallander ne répondit pas. Un détail dans les habits de Wetterstedt venait d’attirer son attention. La braguette était ouverte.
— Est-ce que vous avez touché à ses vêtements ? demanda-t-il.
— Seulement derrière, au niveau de la plaie de la colonne vertébrale, répondit le médecin.
Wallander hocha la tête. Il sentait son malaise revenir.
— Puis-je vous demander une chose ? dit-il. Pourriez-vous vérifier si Wetterstedt a encore dans le pantalon ce qui doit s’y trouver normalement ?
Le médecin le regarda sans comprendre.
— Si quelqu’un est capable d’arracher la moitié du crâne d’un homme, cette personne peut aussi arracher autre chose, non ?
Le médecin hocha la tête et enfila une paire de gants en plastique. Puis il glissa la main avec précaution et chercha.
— Ce qui doit s’y trouver a l’air d’y être encore, dit-il en retirant sa main.
Wallander hocha la tête.
On emporta le cadavre de Wetterstedt. Wallander se tourna vers Nyberg. Il était à genoux à côté du bateau qu’on avait remis à l’endroit.
— Comment ça marche ? demanda Wallander.
— Je ne sais pas, dit Nyberg. Avec cette pluie, toutes les traces disparaissent.
— Pourtant, il va falloir creuser demain.
Wallander répéta ce que le médecin avait dit. Nyberg hocha la tête.
— S’il y a du sang, on le trouvera. Veux-tu qu’on cherche dans un endroit particulier ?
— Tout autour de la barque. Et ensuite dans un secteur allant du portail à la mer.
Nyberg montra du doigt une valise ouverte. Elle contenait quelques sacs plastique.
— Je n’ai trouvé qu’une boîte d’allumettes dans ses poches, dit Nyberg. Le trousseau de clés, tu l’as. Ses vêtements sont de très bonne qualité. Les sabots mis à part.
— La maison semble ne pas avoir été touchée, dit Wallander. Mais j’aimerais bien que tu puisses y jeter un coup d’œil dès ce soir.
— Je ne peux pas être à deux endroits en même temps, répondit Nyberg, en grommelant. Si tu veux qu’on trouve des indices ici, il faut chercher avant que la pluie n’efface tout.
Wallander allait retourner à la maison de Wetterstedt quand il remarqua que Göran Lindgren était toujours là. Wallander se dirigea vers lui. Il vit qu’il était transi.
— Tu peux rentrer maintenant, dit-il.
— Je peux appeler mon vieux pour lui dire ?
— Tu peux.
— Qu’est-ce qui s’est passé ?
— Nous ne le savons pas encore.
Derrière les barrières de sécurité, il restait encore une grappe de curieux qui observaient le travail des policiers. Quelques personnes âgées, un jeune homme avec un chien, un jeune garçon sur une mobylette. Wallander appréhendait les jours qui suivraient. Un ex-ministre de la Justice dont on a tranché la colonne vertébrale et qu’on a scalpé, c’était le genre de nouvelles que les journaux, la radio et la télévision rêvaient d’avoir tous les jours. Le seul côté positif de la situation : la première page des journaux serait épargnée à la fille qui s’était suicidée dans le champ de colza de Salomonsson.
Il descendit vers l’eau et ouvrit sa braguette pour uriner. Peut-être est-ce aussi bête que ça, se dit-il. La braguette de Gustaf Wetterstedt était ouverte parce qu’il était en train de pisser quand il a été attaqué.
Il commença à remonter vers la maison. Mais il s’arrêta brusquement. Il eut le sentiment que quelque chose lui avait échappé. Puis ça lui revint. Il retourna auprès de Nyberg.
— Sais-tu où est Svedberg ?
— Il est en train d’essayer de se procurer de quoi couvrir le sol, et si possible deux grandes bâches. Il faut recouvrir le sable si on ne veut pas que la pluie fasse tout disparaître.
— Je voudrais le voir quand il reviendra. Où sont Martinsson et Hansson ?
— Martinsson est parti manger un morceau, répondit Nyberg, de mauvaise humeur. Mais qui a le temps de manger dans ce bordel ?
— On peut envoyer quelqu’un te chercher quelque chose, dit Wallander. Où est Hansson ?
— Il devait aller informer le procureur. Et je ne veux rien à manger.
Wallander reprit le chemin de la maison. Après avoir accroché sa veste trempée et enlevé ses bottes, il se rendit compte qu’il avait faim. Dans le bureau de Wetterstedt, Ann-Britt Höglund fouillait dans ses tiroirs. Wallander alla dans la cuisine et alluma la lumière. Il se rappela qu’ils avaient bu du café dans la cuisine de Salomonsson. Maintenant celui-ci était mort. Comparé à la cuisine du vieil agriculteur, c’était un autre monde. Des casseroles de cuivre étincelantes pendaient aux murs. Au milieu de la cuisine, il y avait un foyer ouvert avec une cheminée raccordée à un vieux four à pain. Il ouvrit le réfrigérateur et en sortit un morceau de fromage et une bière. Il trouva du pain dans un des beaux placards muraux. Il s’assit à la table de la cuisine et se mit à manger, l’esprit vide. Il venait de finir son repas quand Svedberg apparut dans l’entrée.
— Nyberg m’a dit que tu voulais me voir ?
— Comment ça s’est passé avec les bâches ?
— Nous essayons de recouvrir du mieux que nous pouvons. Martinsson a téléphoné à la météo pour demander combien de temps ça allait durer. Ça va continuer toute la nuit. Ensuite, il y aura une éclaircie d’une ou deux heures avant de nouvelles averses. Avec en plus un vent costaud.
Une mare s’était formée autour des bottes de Svedberg. Mais Wallander ne se soucia pas de lui demander de les retirer. Le secret de la mort de Gustaf Wetterstedt n’était pas dans sa cuisine.
Svedberg s’assit et s’essuya les cheveux avec son mouchoir.
— J’ai le vague souvenir que tu m’as raconté un jour que, quand tu étais jeune, tu t’intéressais à l’histoire des Indiens, commença Wallander. Ou je me trompe ?
Svedberg le regarda, étonné.
— C’est exact, dit-il. J’ai lu beaucoup de livres sur les Indiens. Par contre, les films, ça ne m’intéressait pas du tout d’aller les voir, de toute façon ils ne disent jamais la vérité. J’ai correspondu avec un spécialiste des Indiens qui s’appelait Uncas. Il a gagné un concours à la télé une fois. Il m’a beaucoup appris.
— Tu te demandes pourquoi je te pose cette question, poursuivit Wallander.
— Non, pas vraiment, répondit Svedberg. Wetterstedt a été scalpé.
Wallander le regarda attentivement.
— C’est sûr ?
— Si on peut qualifier d’art le fait de scalper, c’était vraiment du grand art. Une entaille avec un couteau bien aiguisé sur le front. Puis quelques entailles vers le haut des tempes. Pour avoir une prise.
— Il est mort d’un coup qui lui a tranché la colonne vertébrale. Juste sous les omoplates.
Svedberg haussa les épaules.
— Les guerriers indiens frappaient à la tête. C’est difficile de frapper sur la colonne vertébrale. Il faut tenir la hache en biais. C’est d’autant plus difficile quand la victime bouge.
— Mais si elle est immobile ?
— En tout cas, ce n’est pas très indien. Ce n’est pas très indien de tuer les gens par-derrière. Ou même de tuer quelqu’un.
Wallander s’accouda, le front contre sa main.
— Pourquoi tu me demandes ça ? dit Svedberg. Ce n’est quand même pas un Indien qui a tué Wetterstedt.
— Quels sont les gens qui scalpent ? dit Wallander.
— Les fous, répondit Svedberg. Un type qui fait ça ne peut pas avoir toute sa raison. Il faudrait l’attraper le plus vite possible.
— Je sais.
Svedberg se leva et sortit. Wallander prit une serpillière et nettoya le sol. Puis il alla voir Ann-Britt Höglund. Il était presque vingt-trois heures trente.
— Ton père n’avait pas l’air très content, dit-elle. Mais il était surtout énervé parce que tu n’avais pas téléphoné plus tôt.
— Il n’a pas tort. Qu’est-ce que tu as trouvé ?
— Curieusement, peu de chose. En surface, rien ne semble avoir été volé. Aucune armoire fracturée. Il devait avoir une employée pour faire le ménage dans cette grande maison.
— Et qu’est-ce qui te fait croire ça ?
— Deux choses. La première, il y a des différences entre les méthodes de rangement d’une femme et celles d’un homme. Ne me demande pas. C’est comme ça, c’est tout.
— Et la seconde ?
— J’ai trouvé dans un agenda le mot « bonniche », à certains jours. L’indication revient deux fois par mois.
— Il a vraiment écrit « bonniche » ?
— Une vieille expression pleine de mépris.
— Peux-tu retrouver quand elle est venue pour la dernière fois ?
— Jeudi.
— Ça explique pourquoi tout a l’air aussi bien rangé.
Wallander s’affala dans un fauteuil en face du bureau.
— À quoi ça ressemblait là-bas ? demanda-t-elle.
— Un coup de hache sur la colonne vertébrale. Mort sur le coup. Le meurtrier lui a arraché le scalp puis il s’est enfui.
— Avant, tu disais qu’ils devaient être deux.
— Je sais. Mais pour le moment, tout ce que je sais, c’est que je n’aime pas du tout ça. Pourquoi tue-t-on un vieil homme qui vit dans un endroit reculé depuis vingt ans ? Et pourquoi prend-on son scalp ?
Ils restèrent assis en silence. Wallander pensait à la fille en feu. À l’homme au cuir chevelu arraché. À la pluie qui tombait. Il tenta de combattre ces visions horribles en se remémorant comment Baiba et lui s’étaient glissés derrière une dune de Skagen pour se mettre à l’abri du vent. Mais la fille continuait à courir avec ses cheveux en feu. Et Wetterstedt était sur un brancard en route pour Malmö.
Il chassa ces pensées et regarda Ann-Britt.
— Fais-moi un résumé de la situation, dit-il. Qu’est-ce que tu en penses ? Que s’est-il passé ? Décris-moi les faits. Sans te censurer.
— Il est sorti, dit-elle. Une promenade jusqu’à la plage. Pour rencontrer quelqu’un. Ou simplement pour se dégourdir les jambes. Mais il avait prévu de ne faire qu’une petite promenade.
— Pourquoi ?
— Les sabots. Vieux et usés. Inconfortables. Mais suffisants quand on ne sort pas trop longtemps.
— Et ensuite ?
— Ça s’est passé le soir. Qu’a dit le médecin sur l’heure ?
— Il ne savait pas encore. Continue. Pourquoi le soir ?
— Le risque d’être découvert est trop grand dans la journée. En cette saison, la plage n’est jamais déserte.
— Et ensuite ?
— Il n’y a pas de mobile évident. Mais il me semble que le meurtrier devait avoir un plan.
— Pourquoi ?
— Il s’accorde le temps de cacher le cadavre.
— Pourquoi le fait-il ?
— Pour en retarder la découverte. Parce qu’il veut avoir le temps de se mettre à l’abri.
— Mais personne ne l’a vu ? Et pourquoi dis-tu « il » ?
— Une femme a peu de chances de réussir à trancher la colonne vertébrale de quelqu’un. Une femme désespérée peut éventuellement donner un coup de hache dans la tête de son mari. Mais elle ne le scalpera pas. C’est un homme.
— Tu as dit à peu près tout ce que nous savons. Il est temps de laisser la maison à Nyberg et à ses hommes.
— Tout ça va faire beaucoup de bruit.
— Oui. Dès demain. Tu peux t’estimer heureuse de partir en vacances.
— Hansson m’a déjà demandé si je pouvais reporter mes congés. J’ai dit que j’étais d’accord.
— Rentre chez toi maintenant, dit Wallander. Je vais prévenir les autres qu’on se réunira dès sept heures demain matin pour organiser l’enquête.
Une fois seul, Wallander parcourut une fois de plus la maison. Il fallait se faire le plus vite possible une idée de Gustaf Wetterstedt, de sa personnalité. Ils connaissaient une de ses habitudes : chaque soir, à une heure précise, il téléphonait à sa mère. Mais toutes ses autres habitudes qu’ils ne connaissaient pas encore ? Wallander retourna à la cuisine et chercha un papier dans un des tiroirs. Puis il se fit une liste pour la réunion du lendemain matin. Quelques minutes plus tard, Nyberg entra. Il enleva son ciré mouillé.
— Que veux-tu qu’on cherche ? demanda-t-il.
— Le lieu du crime, répondit Wallander. Qui n’est pas ici. Je veux pouvoir exclure le fait qu’il ait été tué ici. Je veux que tu fasses le tour de la maison comme tu le fais d’habitude.
Nyberg hocha la tête et disparut. Tout de suite après, Wallander l’entendit houspiller un de ses collaborateurs. Wallander se dit qu’il ferait bien de rentrer dormir quelques heures. Puis il décida de refaire encore une fois le tour de la maison. Il commença par la cave. Au bout d’une heure, il arriva au premier étage. Il entra dans la grande chambre à coucher de Wetterstedt. Il ouvrit sa penderie. Il écarta les costumes et commença à chercher par terre. Il entendait la voix énervée de Nyberg au rez-de-chaussée. Il allait fermer les portes du placard quand il aperçut un petit sac dans un coin. Il se pencha et le sortit. Il s’assit sur le bord du lit pour l’ouvrir. Le sac contenait un appareil photo. C’était un appareil bon marché, du même type que celui que Linda avait acheté l’année précédente, avec une pellicule dedans. Sept photos avaient été prises sur trente-six. Il le remit dans le sac. Puis il descendit voir Nyberg.
— Il y a un appareil photo dans ce sac, dit-il. Fais développer la pellicule le plus vite possible.
Il était près de minuit quand il quitta la maison de Wetterstedt. Il pleuvait toujours très fort.
Il rentra directement chez lui.
Une fois dans son appartement, il s’assit dans la cuisine. Il se demandait ce qu’il y avait sur les photos.
La pluie frappait contre les vitres.
Soudain, il se rendit compte que la peur venait de s’installer en lui subrepticement.
Il s’était passé quelque chose. Mais il sentait que ce n’était qu’un début.